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Christian Hugonnet. Photo : Semaine du Son

Mots-Clés : Semaine du Son, acoustique, audition, musique

Avez-vous déjà dressé l’oreille aux sons d’une ville? Prenez donc le temps de vous arrêter pour l’entendre respirer… « Montréal ne sonne pas comme Paris. Elle a sa propre signature sonore liée à sa cartographie, à ses constructions et à son activité humaine », explique Christian Hugonnet, ingénieur-conseil en acoustique et techniques de prise de son, et président de la Semaine du Son.

Véritable observatoire du son, la Semaine du Son décrypte depuis 6 ans, et dans 27 villes de France, des problématiques liées à l’acoustique, à la santé auditive, à l’expression musicale et à notre environnement sonore dans toute sa diversité. Une manifestation qui met les sons à l’honneur… et dont la première édition québécoise a lieu cet automne.

« Nous vivons dans un environnement très sonore. On peut l’oublier, car nous vivons à l’époque où l’image domine. Le son, c’est pourtant le liant de nos vies, et il appartient à tous. Développer ses connaissances sur nos environnements sonores aide à mieux se comprendre. Et, donc, cela rend intelligent! »

Écologie sonore

Mais, du restaurant au centre commercial, les sons peuvent aussi se faire envahissants! « Nous avons besoin du bruit, c’est un facteur d’équilibre qui permet de se sentir exister. Mais les rumeurs de la ville deviennent assourdissantes. Qui s’entend marcher aujourd’hui? questionne Christian Hugonnet. Quelqu’un qui marche donne une foule d’information sur lui et sur la ville : type de chaussure, qualité du macadam, personnalité et humeur, etc. Lorsqu’on ne s’entend plus, on perd ses repères. »

 

 

On identifie souvent, d’ailleurs, une personne que l’on rencontre à sa voix. Plus forte que l’image, la perception sonore se vit intérieurement. C’est sans doute pour cela que les nuisances sonores sont vécues comme des agressions. « Les gens disent souvent qu’ils préféreraient perdre l’oreille plutôt qu’un œil. Pourtant, lorsqu’on perd l’audition, on perd la parole, et perdre l’expression orale condamne souvent les gens à une vie de misère », tranche Christian Hugonnet.

Le son comme patrimoine

Pour Christian Hugonnet, la passion pour les sons remonte à l’enfance. Tout jeune, il parcourait la campagne pour enregistrer les sons de la vie. Une cueillette de trésors. « J’ai toujours aimé les sons. Cette idée de vouloir les conserver et les mettre en mémoire est le pendant audio et naturel de la photographie », explique-t-il.

Le son est partout. Il n’y a qu’à tendre l’oreille. Mais certains commencent à disparaître. « Par exemple, nos enfants ne connaîtront jamais le bruit d’une faux utilisée autrefois par les paysans pour sectionner le fourrage. » D’où l’importance de poursuivre un travail de préservation et de conservation. Le président de la Semaine du Son signale d’ailleurs l’existence de banques sonores à l’Institut national de l’audiovisuel (INA) et à la Bibliothèque nationale de France (BNF), en plus d’un programme français de numérisation des 78 tours et microsillons.

Et qui peut penser se priver de musique? « C’est un élément-clé, un facteur d’épanouissement et d’équilibre. Mais il faut la démocratiser. Elle n’est jouée que par 2 % de la population française. Dans les écoles, nous en restons à l’enseignement de la flûte à bec », lance-t-il.

 

Paris, vue de l’Arc de Triomphe vers le quartier de La Défense.

Manifestation sonore

Pour Christian Hugonnet, qui a notamment travaillé aux services techniques de diffusion de Radio-France et de l’INA, un seul mot d’ordre à la Semaine du Son : elle doit être démocratique. L’idée : rendre accessible le savoir sur le son au plus grand nombre de personnes. « C’est mon côté enseignant », soutient celui qui a enseigné durant 15 ans à l’École nationale supérieure Louis-Lumière. Aujourd’hui soutenue par un organisme sans but lucratif, la Semaine du Son se propage un peu partout.

Après la semaine « parisienne », qui se tient en janvier de chaque année, la Semaine du Son diffuse ses connaissances au sein de 27 villes de France, Lyon et Marseille en tête. Cette manifestation reçoit même le soutien de différents ministères français : celui de la Culture et de la Communication, de la Santé et des Solidarités, de l’Écologie et du Développement et même du ministère de l’Éducation nationale.

Ingénieurs du son, acousticiens, mais également musiciens, chirurgiens et sociologues s’y rencontrent afin de partager leurs savoirs et savoir-faire avec le public. Près de 450 intervenants participaient à la dernière édition. « C’est passionnant de parler d’un même élément sous plusieurs éclairages. Ces échanges apportent beaucoup dans le champ des connaissances, mais contribuent aussi à notre objectif de développement durable des environnements sonores », soutient Christian Hugonnet, qui parle même d’une « écologie sonore » à préserver.

Acoustique des gares et des aéroports, prévention de la « mal audition », musiques de films et fonds sonores à la télévision sont quelques-uns des thèmes abordés lors de ces journées ponctuées par des rencontres et des ateliers. Au final : un pôle de savoirs construit autour du son, dont les cinq axes (acoustique, santé, techniques de prise de son, cinéma et musique) traduisent l’inépuisable richesse. Cette manifestation a d’ailleurs reçu un Décibel d’Or du Conseil national du bruit, un organisme consultatif du ministère français de l’Écologie et du Développement.

Alors que Cédric Kaplisch affiche l’identité sonore de Paris dans le film du même nom, Christian Hugonnet aimerait propager sa Semaine du Son à l’international. Avec cette première édition québécoise, c’est chose faite!

Isabelle Burgun, collaboration spéciale


La trame sonore de Paris :
Bande-annonce du film Paris
L’Histoire a des oreilles

Pour en savoir plus :
La Semaine du Son en France, www.lasemaineduson.org