Mots-clés : insectes, sons, entomologie, Semaine du Son

Diplômé de l’UQÀM et de l’Université McGill, Georges Pelletier travaille depuis 26 ans au ras des pâquerettes… à la recherche et à l’écoute des insectes du Québec.

Au Centre de foresterie des Laurentides, une division du Service canadien des forêts, Georges Pelletier consacre l’essentiel de ses journées à identifier et à répertorier les insectes, quand il n’est pas sur le terrain à évaluer les impacts de perturbations naturelles (feu, épidémies d’insectes) et humaines (coupes à blanc, réaménagement) sur la santé des forêts.

« Nous utilisons les insectes comme bio-indicateurs pour mesurer l’ampleur des dégâts. Est-ce que la forêt va se régénérer dans son état original suite aux perturbations? Les insectes nous l’indiqueront », explique-t-il.

Auditions sur le terrain

Si le Québec compte chaque été sa part de concerts en plein air, il y en a un que personne n’avait songé à enregistrer : celui des insectes. Une lacune que Georges Pelletier a comblée il y a une quinzaine d’années en publiant le Guide sonore des insectes chanteurs.

Micro à la main, M. Pelletier a sillonné les forêts et marécages du Québec à la recherche des plus belles « voix » d’insectes. Cet été-là, pendant que la fourmi travaillait, la cigale, elle, passait une audition. Un processus parfois périlleux. « Je capturais mes spécimens avec un filet fauchoir et les enregistrais sur le terrain même. Mais pour réaliser ces centaines d’heures d’enregistrement, j’ai dû prendre quelques risques... et en payer le prix! », se remémore Pelletier. « Je pense, entre autres, à ma voiture restée coincée dans un sentier forestier à plusieurs kilomètres de toute civilisation! »

 

La cigale caniculaire (Tibicen canicularis). Photo : Cephas, Wikimédia

Groupes de musique

Bien que les chants d’insectes ne soient pas aussi mélodieux que celui des oiseaux, l’objectif poursuivi est le même : attirer les femelles. Chaque espèce a d’ailleurs son propre répertoire.

« Un grillon possède un chant très musical et continu, alors que celui de la sauterelle est saccadé, sans tonalité, beaucoup moins musical. Mais, dans les deux cas, le son est émis en faisant vibrer leurs ailes l’une contre l’autre. »

Quant aux criquets, la plupart des espèces du Québec ne chantent pas. Et les rares qui le font utilisent leurs pattes. « À la manière d’un violoniste, le criquet émet un son en faisant vibrer ses pattes arrière sur le rebord de ses ailes », ajoute l’entomologiste.

Pour ceux qui s’imagineraient déjà experts, sachez que le son émis par un insecte varie aussi en fonction de la température : « L’insecte en tant que tel ne modifie pas son chant, mais la température ambiante va beaucoup influencer la fréquence, la vibration et la tonalité de ce que nous entendons. Il existe même une formule mathématique pour déduire la température à partir du son d’une espèce de grillons! »

 

Le criquet (Caelifera). Photo Thomas Bresson, Wikimédia

Méfiez-vous des imitations!

L’avenir est rempli de projets pour l’entomologiste vedette, qui dispense régulièrement des formations auprès d’étudiants en biologie. Il s’adonne aussi à la photographie numérique à partir d’une binoculaire. « Avec mes clichés, je souhaite produire des clés d’identification pour faciliter l’identification des espèces dans différents groupes d’insectes. Ces outils de vulgarisation seront bientôt disponibles sur Internet », ajoute-t-il, fièrement.

Est-il possible d’attirer les insectes en imitant leur son, comme les chasseurs le font avec les caribous? Georges Pelletier en doute, mais cela ne l’empêche pas de perfectionner ses imitations de chants d’insectes. Paraît-il qu’il refuse rarement une occasion de démontrer ses talents!

Guillaume St-Onge, collaboration spéciale


Le Guide sonore et visuel des insectes chanteurs du Québec et de l’Est de l’Amérique du Nord (Éditions Broquet).
Pour écouter un extrait : http://aeaq.ca/bandeson.htm