Mots-clés : Son, MP3, audition, Semaine du Son

Ils représentent près de la moitié des élèves de leur école secondaire. Beaucoup d’entre eux se doutaient déjà que le volume de leur baladeur numérique était trop élevé; d’autres l’ignoraient. Une étude menée pour un projet d’expo-sciences les aura tous ramenés à la réalité : leur exposition au bruit à travers les écouteurs de leur baladeur dépasse le niveau sécuritaire accepté en milieu de travail. Autrement dit, en seulement une heure et demie d’écoute quotidienne, ces jeunes de 14 à 17 ans endurent un volume sonore équivalent à celui produit par le bruit d’une tondeuse à gazon pendant huit heures. Déjà, on voit poindre des problèmes d’audition.

On note, par exemple, que 16 % des élèves dans le groupe écoutant leur musique le plus fort souffrent d’acouphènes, comparativement à 4 % parmi ceux qui gardent le volume bas. De plus, 20 % d’entre eux disent écouter la télévision plus fort qu’un an auparavant. Et environ 15 % estiment que leur audition est moins bonne que cinq ans plus tôt. Bien que ces deux dernières observations suggèrent une perte d’audition, il est toutefois difficile de les attribuer exclusivement à l’écoute de musique trop forte.

Un résultat plus rassurant : en vieillissant, les jeunes tendent à baisser le son. La proportion d’entre eux ajustant le volume au-delà du niveau sécuritaire passe de 40 à 25 % alors qu’ils avancent en âge de 14 à 16-17 ans. L’enquête a de plus révélé que ces jeunes écoutent leur baladeur en moyenne une heure et demie par jour la semaine et une heure par jour la fin de semaine. Aucune différence n’a été démontrée entre les filles et les garçons.

 

Un concert rock peut produire jusqu’à 120 décibels. Photo : Valentin Ottone, Wikimédia

Une enquête sur des jeunes par des jeunes

Le projet d’expo-sciences qui a permis d’obtenir ces résultats a été réalisé par deux étudiantes de 5e secondaire. Raphaëlle Fiset et Laurence Isabelle ont mené cette enquête auprès d’étudiants de 3e, 4e et 5e secondaires de leur école des Compagnons de Cartier située dans la région de Québec.

Les participants ont d’abord rempli un questionnaire en ligne au sujet de leurs habitudes d’écoute, puis ils ont accepté de faire mesurer le volume sonore auquel ils ajustent habituellement leur baladeur numérique. Le projet des deux étudiantes a atteint la finale québécoise de l’Expo-sciences Bell 2008. Il faisait également partie d’une étude menée par le chercheur Benoît Lévesque de l’Institut national de santé publique du Québec. Ce dernier a parrainé les deux étudiantes et leur a fourni le soutien technique nécessaire.

Parmi les participants à l’étude, un jeune avait l’habitude d’écouter sa musique à un niveau sonore de 110 décibels (dB). Pour les oreilles, c’est presque un concert rock par jour! Et pour la majorité des gens, 120 dB est un niveau de bruit douloureux.

Ce cas est toutefois exceptionnel. Mais, devrait-on quand même bloquer le volume sonore des baladeurs numériques à des niveaux sécuritaires? « Oui, souhaite Raphaëlle Fiset. Dans certains pays, la loi oblige les fabricants de baladeurs à limiter le volume sonore. Mais, en France, par exemple, le seuil est de 100 décibels. Et on considère que le niveau sécuritaire est de 85 dB. » Surtout que l’échelle des décibels est exponentielle, ce qui signifie qu’écouter un bruit de 80 dB pendant 8 heures équivaut à écouter un bruit de 90 dB pendant seulement 20 minutes.

Selon Raphaëlle Fiset, « Participer à l’étude a fait prendre conscience aux jeunes de leurs mauvaises habitudes ». Reste à voir s’ils en adopteront maintenant de meilleures.

Bruno Lamolet, collaboration spéciale

Raphaëlle Fiset et Laurence Isabelle présentent leurs résultats lors d'une conférence grand public
dans le cadre de la Semaine du Son